Читаем без скачивания Если душа родилась крылатой - Марина Цветаева
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Le poeme de la montagne
Liebster, Dich wundert die Rede?Alle Scheidenden reden wie Trunkeneund nehmen gerne sich festlich…Holderlin
Dedicace
Que tu tressailles —Et tombent des montagnes,Et monte — l’ame!Laisse mon chant monter:Chant de l’entaille,De ma montagne.Je ne pourraiNi la`, ni deґsormaisCombler l’entaille.Laisse mon chant monterTout au sommetDe la montagne.
1Cette montagne eґtait le torseD’un conscrit renverseґ par la mitraille.La montagne voulait des noces,Des le`vres vierges, un ceґreґmonial.Cette montagne — l’еxigeait.Irruption de l’oceґan dans l’oreille,Criant «hourra» d’un meme jet.Cette montagne errait et guerroyait.Montagne pareille au tonnerre.C’est en vain qu’on joue avec les titans!De la montagne — la dernie`reMaison au bout du faubourg: souviens-t’en!Des mondes — que cette montagne!Pour le monde il prend cher, Dieu est avide.L’entaille vint de la montagne.La montagne eґtait par-dessus la ville.
2Parnasse, Sinaї?Non! Simple colline a` casernes,Rien d’autre — feu! vas-y!Bien qu’octobre et non mai, qu’y faire?Cette montagne-ciM’eґtait le paradis!
3Paradis sur la paume offert— Qui s’y frotte, brule entier! —La montagne avec ses ornie`resDeґvalait sous nos pieds.Comme un titan avec ses pattesDe buisson et de houx,La montagne agrippait nos basquesEt ordonnait: — debout!Paradis — oh, nul b-a-ba,— Courants d’air: d’air troueґs! —La montagne nous jetait basEt attirait: — coucheґ!Comment? C’est a` n’y rien comprendre:Propulseґs, eґbahis!La montagne eґtait consacranteEt deґsignait: — ici...
4Perseґphone, pour ce grain de grenade...L’oublier en plein gel d’hiver?!Double coquille des le`vres qui tardent,Leur bord aux miennes — entrouvert.Perseґphone, pour un grain deґgradeґe!La pourpre opiniatre des le`vres,Et tes cils — pure brisure et, doreґe,La dent de l’eґtoile s’eґle`ve...
5Ni erreur — que la passion, ni conte,Et nul mentir, mais: d’un jour!Ah! Si nous eґtions venus au mondeEn terrestres de l’amour!Ah! Si tout bonnement, d’un sens sur:Ca? — colline! Mamelon!(A l’attrait pour le gouffre on mesure,Dit-on, le niveau des monts.)Dans les touffes de bruye`re fauve,Les souffrants lots de pins...(... Le deґlire: au dessus du niveauDe la vie.)— Prends, je suis tien!Heґlas! La famille douce, ronde,Les gazouillis qu’eux savourent...Puisque nous sommes venus au mondeEn ceґlestes de l’amour!
6Lamentait la montagne (en terre tant resteAme`re l’entaille ou` saignent les ruptures),Lamentait la montagne sur la tendresseTenaillante de nos matins obscurs.Lamentait la montagne sur notre lien:Nos le`vres: parenteґ des plus imparables!Teґmoignait la montagne — qu’a` chacunIl serait du selon ses larmes.Et la montagne teґmoignait — camp tsigane,La vie! de cur en cur qu’on brade son temps!La montagne lamentait encore: Agar,Il la fit partir — avec l’enfant pourtant!Et la montagne teґmoignait — nous: jouetsDu deґmon! Nulle intention dans ses montages!La montagne parlait, nous eґtions muets.Nous nous en remettions a` la montagne.
7Lamentait la montagne — rien que tristesseResterait du sang et brasier qui sont notres.Teґmoignait la montagne: elle ne nous laisse-Rait pas, ne t’admettrait pas avec une autre.Lamentait la montagne — rien que fumeґeResterait de nos citeґs et au-dela`.Teґmoignait la montagne — nous: destineґsAux autres (je n’envie pas ces autres-la`!).Lamentait la montagne — d’un poids affreux,Le serment qu’il est trop tard que nous reniions.Teґmoignait la montagne — vieux est le nudGordien — devoir et passion.Lamentait la montagne sur notre entaille —Demain! Attends! Quand au-dessus de nos frontsNon la mort, — seul memento: la mer eґtale!Demain, quand nous comprendrons.Un bruit... Comme si quelqu’un tout simplement —Eh bien.... pleurait tout pre`s?Lamentait la montagne, seґpareґmentDescendre il nous faudraitDans la vie dont nous savons bien tous: bohe`me,Boue, bazar, et caetera...Teґmoignait encore que tous les poe`mesDes montagness’eґcriventcomme ca.
8Cette montagne eґtait la bosseD’Atlas, — titan geґmissant qui tient bon.La montagne fera la forceDe la ville ou` de`s l’aube nous battonsNos vies comme cartes jeteґes!— Passionneґs, obstineґs a` ne pas etre.Ainsi que l’ours pour l’apreteґDe son cri, ainsi que les douze apotresReґveґrez mon ingrate grotte.(Grotte — j’eґtais, ou` les vagues s’engouffrent!)De ce jeu la dernie`re porte,T’en souviens-tu — tout au bout du faubourg?Des mondes — que cette montagne!Les dieux se vengent de leurs simulacres.L’entaille vint de la montagne.La montagne eґtait sur moi seґpulcrale.
9Passeront les anneґes, la pierre sus-diteEn plate sera changeґe, oteґe.Alors notre montagne sera construiteDe pavillons, d’enclos — grignoteґe.On dit qu’en bordure, sur de tels coteauxL’air est plus pur et qu’il fait bon vivre.Et l’on se mettra a` tailler des lambeaux,A rayer de linteaux l’herbe vive,A niveler mes cols et tous mes ravins —A l’envers! Car il faut qu’un soupconDe maison entre dans le bonheur d’au moinsQuelqu’un, — de bonheur — dans la maison!De bonheur, — dans la maison, d’amour deґnueґDe fiction et de tension des veines!C’est qu’il faut etre femme et le supporter!(Il fut bel et bien, quand tu venais,Le bonheur — dans la maison!) D’amour tranquille,Sans que rupture et couteau s’imposent.Des ruines de notre bonheur une villeSe le`vera — d’eґpoux et d’eґpouses.Et au bon air dans cette meme nature— Si tu peux — faute! Tant qu’il est tot! —Les boutiquiers pourront en villeґgiatureMacher et remacher leur magot.Et d’inventer des couloirs courbes ou droitsPour que, brin a` brin, la maison — fut!Car il faut bien qu’au moins quelqu’un ait un toitEt un nid de cigogne au-dessus.
10Jamais la montagne n’oubliera — le jeuSous le poids de pareils fondements.Se perdre — on le peut, — la meґmoire: on ne peut:La montagne a montagnes de temps!Et ils comprendront! Que leurs yeux s’eґcarquillentDevant les crevasses obstineґes:Non pas monticule planteґ de familles, —Mais crate`re qu’on a deґclencheґ!On n’immobilisera pas le VeґsuvePar des vignes! Avec du lin onNe tiendra pas un geґant! La folle eґtuveDes le`vres suffit afin qu’en lionLes vignes changeґes, se retournent soudain,Crachant sur vous des laves de haine.Vos filles seront rien moins que des putainsEt vos fils eґcriront des poe`mes!Fille, eґle`ve un enfant naturel! Dehors,Fils! Livre-toi aux femmes du vent!Il ne vous sera pas donneґ, vous — les corps,De seґjour de plaisir sur mon sang!Plus dur que la pierre angulaire — voiciLe serment d’un mourant qui deґfaille:Il ne vous sera pas donneґ, vous — fourmis,De bonheur d’en-bas sur ma montagne!Vienne un temps ignoreґ, — une heure incertaine,— Famille au complet — vous connatrezLa montagne du commandement septie`me,— Montagne eґnorme, deґmesureґe.
Postface
La meґmoire a des effondrements,Les yeux sont recouverts de sept taies...Je ne te vois pas — seґpareґment.Un trou blanc — a` la place des traits.Sans indices. Trou, vaste paleur— Que toi, tout toi! (L’ame n’est que plaies,Pure plaie.) C’est l’uvre des tailleursDe marquer les deґtails a` la craie.Tout le ciel d’un seul tenant s’eґtale.L’oceґan: des gouttes le remplissent?Sans indices. Tout entier — speґcial —Lui! Complice est l’amour, non police.Pelage d’alezan, de moreau?Que le voisin le dise: il voit bien.La passion coupe-t-elle en morceaux?Et moi, suis-je horloger, chirurgien?Tu es un cercle entier — pleinement.Tourbillon — pleinement, bloc entier.Je ne te vois pas seґpareґmentDe l’amour. Signe d’eґgaliteґ.(Dans les touffes de duvet, la nuit,— Collines d’eґcume par rafales —La nouveauteґ eґtrange pour l’ouїe,Au lieu du «je»: le «nous» impeґrial…)Mais dans les jours eґtroits, indigents— «La vie, telle qu’elle est» — en revanche,Je ne te vois pas conjointementAvec aucune.— Meґmoire se venge.
Le poeme de la fin
1Le poteau sur un ciel rouilleґ,Doigt hautain.Lui, posteґ au lieu deґsigneґ;— Le destin.Moins le quart. Ponctuel, non? — La mortN’attend pas.Exageґreґment de`s l’abord:Chapeau bas.Chaque cil d’un deґfi — chargeґ!Bouche: exclue.Exageґreґment deґgageґ,Le salut.— Moins le quart. Exact, non? SyllabesSonnant faux.Le cur tombe: qu’a-t-il? SignalDu cerveau!Ciel des noirs preґsages: acierEt rouilleur.Lui, preґsent au lieu familier.Soir: six heures.Ce baiser: le`vres de boix! BienInsonore!Tel qu’aux souveraines — la main,Tel qu’aux morts...Citoyen se preґcipitant:Les reins prennent.Exageґreґment lancinante,La sire`ne.Hurlante, ainsi qu’un chien rugit,— Bruit rageur.(Exageґration de la vieQuand on meurt).Soudain, — ce qui n’est qu’a` mi-corps —Jusqu’aux astres.(Exageґreґment, ou encore:Tout plus vaste).Mentalement: cher, cher. — Quelle heure?— Sept, disons.Au cineґma, ou bien? — Lueur:«La maison!»
2Libre fratrie nomade, —C’est la` qu’on te menait!C’est l’eґclair, la tornade,Le sabre — son reflet,Ce sont les mots en fouleQue d’effroi nous taisons.C’est la maison qui croule —Ce mot: maison.Cri de l’enfant perdu:Ma maison!Le tout-petit — son du:«Ma», «mes», «mon»!Mon fre`re en aventure,Ma fie`vre et ma fusion,On se rue hors des murs,Et toi — a` la maison!Cheval ruant rompt l’attache —Les cimes! — Corde en charpie.— Mais de maison, pas la trace!— Si, a` dix me`tres d’ici:La maison sur la montagne.— Plus haut, encore? — Au sommet.Au bord du toit, la mansarde.— «Qui ne brule pas du faitDe la seule aube?» De`s lors,Vivre? — Poe`mes, raillez!Maison, c’est dire: dehors,Dans la nuit.(A qui narrerMa peine, oh! a` qui ma perte?L’horreur violaceґe, qui l’ouїt?...)—Votre reґponse — enfin prete? —C’est un meґditatif: — oui.
3Et maintenant — le quai. A l’eauJe me tiens comme a` un corps dur.Seґmiramis, ah! ils sont beauxTes jardins suspendus, pour sur!A l’eau — rouleau de mineraiAux macabres enluminures —Je me tiens, comme a` son livret —La cantatrice, comme aux mursL’aveugle... Prise dans tes froids?Tu m’entends? — Je me penche (chiche?)A l’eґtancheuse-en-toute-soifJe me tiens, comme a` la cornicheLe somnambule...Peur, mais pasDue au fleuve — suis neґe naїade!Prendre le fleuve pour le brasDe l’aimeґ, quand il accompagne,Fide`le...Des morts c’est l’octroi!Oui, mais tous ne vont a` l’aurore...La mort a` gauche et coteґ droit —Toi. Mon flanc droit est comme mort.La lumie`re irradie d’un coup.Rire a` grelots de bricolage.«Vous et moi, il faudrait que nous...(Frisson)... Nous aurons le courage?»
4La` un brouillard blond transhume,Vague d’un volant de gaz.Surchauffeґ, surenfumeґ,Et surtout — surjacasseґ:Ce que ca sent? Folle presse,Combine et copinerie,Cachotteries de commerceAinsi que — poudre de riz.Ceґlibataires bagueґs,Jeunes vieillards aduleґs...Surmoqueґ, surricaneґ,Et surtout — surcalculeґ!En liquide et en espe`ces,Et le bec et la farine.... Manigances de commerceAinsi que — poudre de riz.(De profil: — ca la`, c’est notreMaison? — Pas moi la matresse!)L’un tout a` son cheґquier, l’autreAu chiqueґ d’un gant glaceґ.Celui-la` tout doux s’empressePre`s d’un petit pied verni.... Epousailles de commerceAinsi que — poudre de riz.Brisure d’argent: l’emble`meDe Malte au carreau, — stellaire!Surcaresseґ, suraimeґ,Et surtout — surcompresseґ!Surpinceґ... (Il pue, le resteDe mangeaille: dis merci!)... Tripotages de commerceAinsi que — poudre de riz.Courte, la chane? En revanchePas de l’acier, du platine!Des troncs machent une trancheDe veau, tremblant de leur tripleMenton. Sur un cou conesque,Le diable — a` tete d’outil.... Catastrophe de commerceAinsi que — poudre de qui?Berthold Schwarz...Un homme doueґ —Et bienfaiteur de l’entourage.— Vous et moi, il faudrait que nousParlions. — Nous aurons le courage?
5Mouvement des le`vres. Je sais:Ne parlera pas le premier.— Vous ne m’aimez pas? — Mais si je....— Vous ne m’aimez pas! — Et mineґ,Et liquideґ, eґlimineґ!(Regard d’aigle sur les parages)— Ca — la maison? Vous y pensez?— La maison est en moi. — Verbiage!L’amour, c’est de chair et de sang.Rougi de son sang qui s’eґtale.L’amour, il vous semble que c’est —Bavarder derrie`re une table?Un quart d’heure et chacun se rentre?Ainsi que ces messieurs et dames?Amour, cela veut dire...— Temple?Petit! Que l’on vous plante lameApre`s lame! — Sous l’il braqueґDes viveurs? (Et moi, a` l’ eґcart:«Amour, cela veut dire: arcTendu: arc, corde: l’accord craque.»)— Amour, cela veut dire — lien.Nous, tout est loin: bouches et vies.(Pas de mauvais il! — t’ai-je bienDemandeґ en cette heure intime,L’heure proche au sommet des montsEt de la passion. Memoria —Fumeґe! L’amour, c’est tous les donsAux flammes — et toujours pour rien!)La bouche — fente de coquillePalie. Non rictus — inventaire!— Et avant toute chose — un litUnique.— Abme! — avez-vous l’airDe dire. — Tambour de la main.— Ce n’est pas deґplacer les monts!Amour, cela veut dire...— Mien.Je vous ai compris. Conclusion?Tambour de la main sans arretPlus fort. (L’eґchafaud et la place.)— Partons. — Et moi qui espeґrais:Mourons. C’est tellement plus simple!Les trucs a` bon marcheґ, suffit!Assez de rimes, rails, hotels...— Amour, cela veut dire: vie.— Non, les Anciens le deґnommaientAutrement.— Eh bien? —Le poing serreUn poisson — lambeau de mouchoir.— On y va? — Votre itineґraire?Cartouche, rails, poison — au choix!La mort — sans ameґnagements!— La vie! — En geґneґral romain,Regard d’aigle a` son reґgimentDeґfait.— Quittons-nous deґsormais.
6— Je ne le voulais pas. Ou alorsPas cela. (En silence: eґcoute!Vouloir, c’est le propre des corps,De`s lors l’un a` l’autre — ames nousVoila`...). Et il ne l’a pas dit.(Oui, a` l’heure ou` le train se forme,Le triste honneur de la sortie,Vous le confiez aux femmes commeUne coupe...) — Qui sait? Deґmence?Meґprise? (De courtoise allure,Menteur confiant a` son amanteL’honneur sanglant de la ruptureComme des fleurs...) Une syllabeApre`s l’autre: eh! bien — quittons-nous,Avez-vous dit? (Comme qui lacheUn mouchoir a` l’heure du douxTumulte...) De ce combat-ciVous etes le Ceґsar. (O gifle!Comme un tropheґe — a` l’ennemiConfier l’eґpeґe qu’on a remiseSoi meme!). Il continue. (MonteґeDu bruit...) — Je m’incline a` nouveau:Jamais on ne m’a devanceґDans la rupture. — A toutes vous...?Et ne le niez pas! VengeanceDont Lovelace serait fier.Geste vous honorant par chance,Et m’arrachant, a` moi, la chairDe l’os. — Rire bref: perce laMort. Geste. (Volition: a` bout!Vouloir, c’est le propre d’eux-la`,De`s lors l’un a` l’autre — ombres nousVoila`...) dernier clou, non, dernie`reVis, car de plomb le cercueil — est.— La toute dernie`re prie`re.— J’eґcoute. — Pas un mot jamaisSur nous... a` aucun de ceux..., desSuivants. (De leur brancard ainsiLes blesseґs au printemps — leveґs!)— Je l’aurais demandeґ aussi.En souvenir si je vous donneUn anneau? — Non. — Grand regard vagueDe qui s’absente. (Mets-moi commeUn sceau sur ton cur, une bagueA ta main... Theґatre: pas trop!Avalons!) De biais et tout bas:— Plutot un livre? — Comme aux autres?Du tout! Non, n’en eґcrivez pas,De livres...Donc pas la peine.Donc pas la peine.Donc pas de pleurs.Dans nos fratriesD’errants pecheurs—Nuls pleurs, on rit!On boit — nuls pleurs!Chaleur du sangQu’on paie — nuls pleurs!Perle qu’on fond —Dans le vin! Monde —Ou’on fait! Nuls pleurs!— Ainsi, c’est moi qui pars? Mes yeuxLe traversent. Arlequin jetteUn os — la plus ignominieuseDes primauteґs — a` sa PierrettePour sa fideґliteґ: l’honneurDe la fin. Geste du rideau.Vocable dernier. En plein curUn doigt de plomb: meilleur, plus chaudNet...Dents planteґesEn pleines le`vres.Ne pas pleurer!Le plus muraille —Dans le plus pulpe.Mais — pas pleurer!Fratrie d’errants:On meurt — nuls pleurs!Bruleurs — nuls pleurs!Cendres et chantsCachent le mortChez nous, errants!— La premie`re? Le premier coup?Les eґchecs, en somme? Il faut direQue meme a` l’eґchafaud on nousAppelle les premie`res...— ViteNe me regardez pas! — Regard —(Elles, par cascades deґja`!Que faire pour qu’elles regagnentLes yeux, le dedans?)... De ne pasRegarder!!!Voix forte et claire,Yeux en arret:— Partons, mon cher,Je vais pleurer!Ah! oui! Parmi les tireliresVivantes (commercants — complices)Une nuque blonde va luire:Colza, houblon, seigle et maїs!Bafouant tous les commandementsDu Sinaї — amazonanteToison! — Chevelure-diamant,Golconde des apaisements(Pour tous!). Dame-nature abondeEn biens! Avare: pas toujours!Chasseurs, de ces tropiques blondsOu` est le chemin du retour?Une nuditeґ qui exsudeLe vulgaire, agrippe — adipeuse.Ce ne sont que flots de luxure,Fulminante d’or et rieuse.— N’est-ce pas? — Froleur et friseґLe regard. Chaque cil — la gratte!— Et avant tout: pareil fourreґ!Geste tourniquant en torsade.O geste arrachant rien qu’a` luiLes habits! Plus simple que boireEt manger — rictus! (D’un salutExiste, heґlas, pour toi l’espoir!)Bon! surement ou fre`rement?Une alliancante — alliance! — Rire,N’ayant pas enterreґ vraiment!(Et, ayant enterreґ, — je ris!)
7Puis — le quai, le dernier. Plus tard:Fin. Seґpareґs, priveґs de main,Voisins se tenant a` l’eґcart,On va. Du coteґ du fleuve — unSanglot. Je le`che sans alarmeLe sel du mercure en bouillons:Le ciel a eґpargneґ aux larmesLa grand-lune de Salomon.Poteau. Jusqu’au sang s’y cognerLe front! Qu’il se fracasse! En poudre!Co-meurtriers eґpouvanteґs,On va. (La victime — l’Amour.)Arrete! Deux s’aimant — dormirAvec d’autres? Seґpareґment?— Vous comprenez que l’avenirEst la`-bas? — Moi: renversement!— Dormir! — Le couple a` la mairie...— Dormir! — Ni meme pas, ni memeRythme. — Prenez mon bras, — je prie!On n’est pas des bagnards en chane...Deґcharge. (Main sur main — en fait!Son ame sur ma main!) Comme armeQui charge, au long des fils en fie`vreFait rage, — sa main sur mon ame!Gage. Iriseґ: tout! Plus irisQue les larmes? Collier-rideauDe pluie. — Qu’un quai ainsi finisse— Jamais vu! — Le pont:— Bien? (de dos)Ici? Le-veґe des yeuxCalmes. (Pret — le convoi.)Jusque chez vous, je peux...Pour la der-nie`re fois!
8Le der-nier pont.(Ma main: que moi, je la deґgage?La rende? — Non!)Le dernier pont, dernier peґage.L’eau et les cieux.Pie`-ces pour la mort — eґtaleґes.Un sou gracieuxDu a` Charon pour le Leґtheґ.La pie`ce est d’ombre,D’ombre — la main. Pas un bruit quandCes pie`-ces tombent.Et donc, d’ombre est la main qui prendLa pie`-ce d’ombre.Sans un reflet, sans un eґcho.Pie`-ces — aux tombes!Les morts ont assez des pavots.Le pont.Des-tinationDes amants sans espoir, haut centre:Pont, toi — passion:Convention: rien que «passage-entre».Moi — comme au nidTapie, la cote — je m’y serre.Ni avant, niApre`s: L’espace d’un eґclair!Ni jambes, niBras. Le treґfonds des os l’atteste:Seul mon flanc vit,Que, contre le voisin, je presse.Tout dans le flanc!La vie! Lui — la veille et l’oreille!C’est jaune et blancColleґs! A l’esquimau pareille,— Presseґe, colleґeA la fourrure. Et vous, Siamois!Quoi? Vous — lieґs?!Cette femme-la`, souviens-toi,Maman — tu luiDisais: dans son triomphe quiet,Et toute oubli,Elle te portait, mais — moins pre`s!— Communs! Conjoints!Vois nos jours! Tu m’as berceґe contreTon cur! Plonger?Non! Lacher ta main — Qu’on n’y comptePas! Et blottie,Blottie... Inarrachablement.Pont: non — mari:Amant! — Pur «passage-devant».Tu nous fais vivre,Pont! Nos corps: pature du fleuve!Givre a` la vitre,Hutre: m’extirpent — ceux qui peuvent!Hutre! A la vitre,Givre! Ni divin, ni humain!Me je-ter vive,Comme une chose, moi, dont rienDu monde fauxDes choses, n’a eu le respect!Je reve: il faut!C’est nuit! Dis qu’au matin, apre`s:L’ex-press et Rome!Grenade? Saurais-je ou` je vais,Dans le deґsordreDes Himalayas de duvets?Bre`-che, trou sansNeige: mon dernier sang la chauffe.Entends mon flanc!Les vers — c’est tellement plus gauche...Dis, reґ-chauffeґ?A qui te loueras-tu demain?Raison: faucheґe!Dis que le pont n’a pas de finEt n’en au-ra pas...— Fin— Ici? — Geste incolore,D’enfant. — Bien? — Je le bois.— Un petit peu en-core:Pour la dernie`re fois!
9Au long d’usines reґsonnantes,Vibrant a` l’appel des voix...Sous la langue le secret hanteFemmes et veuves, — a` toi voi —— la` je dis le secret de l’etreQu’Eve a` l’Arbre a celeґ, vivante:Je ne suis pas plus qu’une beteQue quelqu’un a blesseґe au ventre.Ca brule... L’ame qu’on arracheAvec la peau! Au trou! Fumeґe!Partie, l’heґreґsie-grand-panache,L’ineptie, — «ame» deґnommeґe!Chreґtienne, terne infirmiteґ!Fumeґe! De compresses — couvrir!Elle n’a jamais existeґ!Etait — le corps, il voulait vivre,Ne veut plus.Pardonne-moi! Je ne voulaisPas! Clameur des fonds eґventreґs!Condamneґs attendant qu’on lesFusille, — devant l’eґchiquierAu petit jour... Le judas commePris d’un rictus narquois — pour nous!Car c’est bien des pions que nous sommes!Et quelqu’un la` — mais qui? — nous joue.Brigands? Ou dieux au bon vouloir?Tout englobant par le judas —L’il. Cliquetis dans le couloirDu deuil. Planche leveґe — deґja`!Puis, la bouffeґe de cigarette.(Crachat.) — On a veґcu un coup!(Crachat.) Chemin droit qui s’arreteSur les trottoirs du jeu — au bout:Fosseґ! Saigner! Par la lucarne:C’est l’il de la lune qui point...Et sur le coteґ je regarde,Pencheґe — que tu es deґja` loin!
10— Notre cafeґ! — FrissonUnique — a` l’unisson!Notre e`glise! O lot!Couple d’un jour, tre`s tot,Vagabonds sans adresse,On ceґleґbrait la messe.Le bazar, la lavasse,Autre rive et printemps...Un cafeґ deґgueulasse, —C’eґtait du foin vraiment!(C’est l’ardeur des chevauxQu’avec le foin on mate!)D’Arabie — il s’en faut! —D’Arcadie, l’aromateDudit cafeґ...Mais comme la patronne,Nous ayant attableґs,Souriait, habile et bonne, —Et les eґgards d’embleґeDes amantes blanchies:Vivez! On fane, un jour!Sans-le-sou, — nos folies,Baillements, — a` l’amourSouriant, — a` la jeunesse!A nos rires — pour rire,A l’ironie — sans cesse,Aux visages — sans rides, —Surtout — a` la jeunesse!Aux passions — pas d’ici!Venant d’ou`? — qui se presse,Venant d’ou`? — qui jaillitDans le cafeґ blafard:— Les burnous et Tunis! —Aux muscles, aux espoirsSous nos chasubles tristes...(L’ami, qu’on ne me plaignePas: tant de cicatrices!)Et nous raccompagnant,Avec son bonnet lisseEt le linge hollandais...A mi-souvenir, mi-comprendre,Comme de la fete enleveґs...— Notre rue! — D’autres vont la prendre...— Que de fois nous!... — Loin, ses paveґs...— Demain de l’Ouest le soleil part!— David avec Dieu rompt les liens!— Et nous, au juste? — On se seґpare.— Il ne me dit strictement rienCe mot superabsurdissime:Seґ-pa-ra-tion. — Une sur cent?Un mot composeґ de dix signes:Rien que le vide sous-jacent.Attends! La Tcheґquie nous eґgare!En serbe ou croate — on le dit?Seґ-pa-ra-tion. On se seґpare...Surabsurdissime anerie!Oreilles: deґchirement brusqueA ce son — et l’angoisse plus loin...Seґparation — ce n’est pas russe!Pas feґminin! Pas masculin!Pas divin! Quoi! Nous — des brebisBaillant qu’on disperse au repas?Seґparation — en quel sabir?De sens, ca n’en a meme pas,Ni de son! Bruit creux d’une scie,Par exemple, pour un dormeur.Seґparation — ce sont des crisDe rossignols, martins-pecheursChez Khlebnikov...Est-ce possible?Reґservoir videґ — voila` l’air!La main contre l’autre — est audible.Se seґparer — c’est le tonnerreSur la tete... Dans la cabineL’oceґan! Le cap — le dernierD’Oceґanie! Rues — trop a` pic:Se seґparer, mais c’est au piedDe la montagne... Pied pesant:Deux soupirs... Paume — sans retard,Et clou! Argument renversant:Se seґparer — c’est etre a` part,Or nous sommes soudeґs...
11Perdre tout en un tour —Net! Plus rien!Banlieue, faubourg: des joursC’est la fin.Finis — silex, deґlices,Nous, jours et eґdifices.Villas vacantes! (— Me`re ageґe):Meme respect pour celles-la`!Car c’est une action que — vaquer!Le creux ne vaque pas.(Villas vacantes a` moitieґ,Mieux vaudrait vous bruler!)Pas trembler, la blessureInciseґe.Banlieue, banlieue: couturesDeґchireґes.Car l’amour — (sans enflureSuperflue) — est couture.Ni mur, ni pansement, — couture!— Pas d’armure pour toi!Couture: le mort cousu durEn terre, et moi — a` toi!(Le temps dira de quelle trempe:Preґcaire ou reґsistante!)En tout cas, l’ami, — deґchirure!Mille eґclats et deґbris!Fracas! Encore heureux (— cassure!)Qu’elle n’ait pas pourri!Pas d’infection! Rouge — la vieVeineґe sous le bati!Oh! ne perd pas qui romptEn force!Banlieue, faubourg: des frontsLe divorce.Cerveaux — au vent! (Dans lesPeґripheґries — gibets).Oh! ne perd pas qui rompt et part,A l’heure ou` l’aube point!Une vie cousue pour toi, tard,Sans bati, par mes soins.Tordue? Pas de griefs! Faubourg:Rupture des coutures.Ames sans appret: plaiesPartout!...Banlieue, faubourg... Ample estLe courrouxDu faubourg. Entends le destin,Sa botte dans les flaquesDe boue!... Ami, juge ma mainQui coud en toute hate:Le fil — va le deґfaire!Le der-nier reґverbe`re!Ici? La magie gagne —Regard. (Races qui croient:Regard). — Sur la montagne?Pour la der-nie`re fois!
12— Collines. Crinie`reDrue: pluie dans les yeux.Le faubourg — derrie`re,On est en banlieue,On est. Mais qu’en faire?Maratre-vireґe,Plus de lieu sur terre.Nous, ici: crever.Un champ. Haie autour.Fre`re et sur — nous deux!La vie est faubourg. —Construis en banlieue!La cause est, messieurs,Perdue! — Inutile...Des faubourgs — rien qu’eux!Mais ou` sont les villes?!La pluie rage et broie.Debout, nous — deux etres:Rageons. En trois moisPremier tete a` tete.Emprunter — c’est a`Job que voulait Dieu?Mais sans reґsultat...On est en banlieue!A l’exteґrieur! Hors! Hors de la ville!Remparts franchis! Tu comprends?Vivre est un lieu ou` c’est impossible:Le quar-tier juif, du dedans...Et ne vа-t-on pas le front plus haut,En devenant juif errant?Aux yeux de qui n’est pas un salaud,Le po-grome juif eґtantLa vie. Ne vit que grace aux nombreuxReneґgats! Grace aux Judas!Plutot sur les les de leґpreux,En enfer! — mais pas dans laVie, — que pour les reneґgats, que pourLe bourreau: a` lui — la brebis!Le droit a` ma carte de seґjourJe le pieґtine! J’en ris!Pieґtineґ! Bouclier de David —Vengeґ! Viser dans la gluDes corps! N’est-il pas enivrant: vivre —Le Juif ne l’a pas voulu?!Ghetto des eґlites! Au trou! Tiens!Pas de pitieґ! Que des gifles!En ce monde-ci hyperchreґtienLes poe`tes sont des Juifs!
13Aiguiser les couteaux surLe roc, ou bien balayerLa sciure! De la fourrureSous les mains — mouilleґe!Eh bien!, les surs, quoi?!— Force et seґcheresseD’homme! Sous les doigts —Larmes, non averse!De quels charmes maintenantParler? Sur tes biens — l’eau trone!Apre`s tes yeux de diamant,Me ruisselant sous les paumes,Fin de la fin. CessePour moi — le naufrage.Caresses, caressesLe long du visage.C’est notre orgueil a` nous deux —Polonaises, a` nous autres —Marina. Apre`s tes yeuxD’aigle pleurant sous mes paumes...Mon ami, tu pleures!Pardon! Tout est mien!O sel et rondeursAu creux de la main!Larmes d’homme sont brutales.Sur le crane — la massue!Pleure! Et reґpare plus tardLa honte avec moi perdue.U-ne mer relie —Les poissons! Se le`ve:... Coquille sans vie,Le`vres contre le`vres.En larmes.De l’oseille —Au gout.— DemainAu reґveil,Moi — ou`?
14Le sentier a` moutons —Descend. Ville en vacarme.Vers nous, trois filles vont.Elles rient. Face aux larmesElles rient, — plein midiTerrestre, hautes cretesMarines!— Elles rientDe tes larmes abjectes,Indues, d’homme!, visiblesDans la pluie: plaies strieґes!Perle honteuse qu’exhibeLe bronze du guerrier.De tes larmes, — oh! verse! —Premie`res et dernie`res.Tes larmes, ces perlesQue ma couronne acquiert.Mes yeux leveґs — exprе`s!Ils traversent l’averse,Fixes. Fixez plus pre`s,Poupeґes de Veґnus! ResteCe lien-ci plus eґtroitQue l’attrait et l’eґtreinte.Le Chant des Chants nous doitLa parole — on l’emprunte,— Obscurs oiseaux: contraint,Salomon s’eґmerveille,Puisque pleur en communEst bien plus que sommeil!Lui — ployeґ, eґgal — passeLes creux d’ombre en arceaux,En silence, sans trace —Comme sombre un vaisseau.
Envoye de la mer